Comment percer le pouvoir de notre imagination et de notre subconscient
Retrouvez l'interview complète réaliséepar Célia Sampol sur MedicalExpo e-magazine
Quelles sont les différentes techniques et "écoles" d'hypnose ? Quels sont les états cérébraux pouvant induire des états modifiés de conscience ainsi que les neurotransmetteurs impliqués dans le processus ? Quels problèmes et quelles conditions peuvent être traités par l'hypnose… ? Ancien pharmacien, autodidacte en différentes sortes d'hypnose et coach mental pour plus de 500 athlètes de haut niveau, Olivier Madelrieux répond à toutes ces questions dans cette interview en trois parties. Il explique également les techniques pour atteindre voire dépasser ses objectifs en reprogrammant littéralement son esprit subconscient pour en faire son allié. Enfin, il s'adresse à tous ceux qui pensent ne pas être capable d’entrer en hypnose ou qui désespèrent de ne pouvoir réaliser leurs désirs les plus profonds.
MedicalExpo e-magazine: Comment en êtes-vous venu à l’hypnose profonde ?
J’ai un parcours très scientifique à la base, puisque je suis pharmacien depuis 36 ans. J’ai travaillé dans l’industrie pharmaceutique et j’ai été directeur des ventes d’un laboratoire de génériques. Mais parallèlement, j’ai développé depuis très longtemps une passion pour tout ce qui touche à l’ésotérisme. Cela a été une révélation à partir de 1993, à l’âge de 30 ans, lorsque j’ai eu des problématiques personnelles importantes qui m’ont obligé, de manière brutale, à prendre conscience du monde invisible. Durant deux ans, cela a été une recherche incessante de comprendre ce qui m’était arrivé. Je me suis ainsi intéressé à la numérologie et à l’astrologie, je suis entré dans des systèmes initiatiques où j’ai découvert à la fois le magnétisme, l’énergie, les chakras et, surtout, les états modifiés de conscience. J’ai compris que les états modifiés de conscience étaient la clé.
C’est comme ça que j’ai commencé à m’intéresser à l’hypnose dans les années 1998/2000. A l’époque, il n’y a pas encore toutes ces écoles d’hypnose en France. La seule était l’Institut Français d’Hypnose (IFH) mais elle était réservée aux médecins. Vu que je n’étais pas médecin, j’ai décidé d’apprendre par moi-même au travers de lectures, de recherches, de stages. De plus, on n’avait pas encore internet donc on ne trouvait pas tout ce que l’on voulait aussi facilement qu’aujourd’hui. Le 06 mars 1999, quelque chose va arriver et me pousser encore plus dans cette voie : j’ai un terrible accident de voiture qui me laisse dans le coma durant plusieurs heures (et le conducteur durant trois semaines). Pour moi, ce nouvel incident fait partie de ma quête. Lorsque j’étais dans le coma, je n’ai pas vu de tunnel avec une lumière blanche. En revanche, il y avait trois personnes décédées au-dessus de moi mais je ne voulais pas les rejoindre (rires). Ce n’était pas encore mon heure…
Cet accident va réveiller en moi des capacités. Mais le doute demeure, je crains que ce ne soit que du bavardage mental. L’apprentissage de l’auto-hypnose et des états modifiés de conscience va me permettre de sortir de ces doutes car dans ces états-là, le mental n’est plus là.
MedicalExpo e-magazine: Pourriez-vous nous décrire les différents courants de l’hypnose qui existent alors et que vous découvrez peu à peu ?
> En 1999, je découvre tout d’abord la méthode Silva d’auto-hypnose et de maîtrise du mental. Cette méthode a été conçue dans les années 1960 par José Silva, américain autodidacte né au Texas en 1914, comme un outil commercial pour promouvoir le contrôle mental à destination des particuliers et des entreprises. Son objectif est de permettre aux individus d'améliorer la maîtrise de leurs facultés mentales et psychiques. La méthode met l’accent sur la pensée positive, la visualisation, la méditation et l’auto-hypnose.
> En parallèle, j’apprends par moi-même l’hypnose dite “de spectacle”. Mais on ne parle pas ici d’hypnose humoristique visant à se moquer des gens ou à les piéger comme on voit aujourd’hui à la télévision. Non, il s’agit d’une hypnose classique directe qui se fonde sur quatre composantes :
- la fascination du regard en plongeant ses yeux sans ciller dans ceux de la personne en face ;
- le magnétisme en touchant la personne avec ses deux mains ;
- la télépsychie c’est-à-dire la faculté d’imaginer dans son subconscient que la personne en face de nous est en train d’entrer en hypnose (et on peut déjà voir dans notre écran intérieur le résultat) ;
- la suggestion verbale.
J’arpente ainsi durant des mois les rayons des bibliothèques et des boutiques ésotériques et je lis les livres d’auteurs qui, il y a cent ans en arrière, découvraient déjà l’hypnose. Comme par exemple Paul Clément Jagot (1889-1962) qui parle de suggestions, de télépathie, de fascination du regard et de magnétisme, ou encore les Frères Hector (1849-1923) et Henri Durville (1888-1963) qui parlent eux aussi de ces pouvoirs que l’on déclenche à travers les états modifiés de conscience et les états de transe, avec notamment le cas des fakirs.
Je découvre qu’en fait cette hypnose directe existait bien avant, depuis plus de 6000 ans, à travers les Babyloniens, les Egyptiens et même les Grecs. Elle va se perpétuer tout au long du Moyen-Âge puis le médecin allemand Franz Anton Mesmer (1734-1815) va pratiquer l’hypnose sur ses contemporains par le biais des passes magnétiques. Fasciné, je cherche à développer mon propre magnétisme animal et ma propre technique, je voyage dans plusieurs pays du monde en Amérique du Sud, au Canada, chez les Tahitiens et les Hawaïens.
> Je me familiarise également avec la seule hypnose que l’on apprend alors à l’Institut Français d’Hypnose et qui est l’hypnose ericksonienne dite indirecte. Celle-ci n’utilise qu’une seule des quatre composantes de l’hypnose directe citées plus haut, à savoir : la suggestion verbale.
Le courant de l’hypnose ericksonienne s’est créé dans les années 1960-70 et commence à arriver en France à partir de 2002/2003. Cette hypnose est dite “indirecte”, c’est-à-dire qu’elle ne se fonde plus sur des ordres ou des affirmations directes telles que “fermez les yeux”, “vos paupières deviennent de plus en plus lourdes”, “au plus vous respirez au plus vous augmentez votre niveau de transe”, etc. Non, avec l’hypnose ericksonienne, on fait des suggestions telles que : “peut-être que si vous fermez les yeux, vous serez endormi, ou pas…”, “peut-être que lorsque vous serez endormi, vous sentirez quelque chose, ou pas…”, etc. Ainsi, la personne entre petit à petit en hypnose et le thérapeute lui demande que d’un geste de la main elle lui indique quand elle entre en hypnose.
Pourquoi ce courant d’hypnose devenu si populaire ne se fonde que sur une seule composante, la suggestion verbale ? Car dès que l’on évoque les trois autres composantes, on commence à parler de transe, voire de chamanisme et cela fait peur. Pourtant, il faut savoir qu’Erickson lui-même va apprendre la technique directe et va lui-même la pratiquer sur 80% de ses patients, selon ses biographes. Ce n’est que dans les cas où la méthode d’hypnose directe ne fonctionnera pas, qu’il fera de l’hypnose indirecte. Mais en fait, Erickson est directif tout en étant indirect.
> Enfin, il y a un autre courant qui a surgi dans les années 1985/90, c’est : la nouvelle hypnose, qui est également indirecte. Elle reprend l’hypnose ericksonienne mais elle est encore plus permissive et elle comprend de la PNL (programmation neuro-linguistique). Les phrases sont par exemple : “je me demande à quel moment vous allez entrer en hypnose”, “je me demande si vous allez plutôt entrer dans une hypnose légère ou profonde”. Si la personne répond “dans une hypnose profonde” par exemple, c’est qu’elle a déjà accepté la suggestion. C’est-à-dire que c'est la personne, si elle a vraiment envie d’entrer en hypnose, qui va y entrer.
Comme disait Erickson, on essaie de “contourner le facteur critique”—c’est-à-dire le fait que la personne ne veuille pas entrer en hypnose pour des raisons qui lui appartiennent (volonté de garder le contrôle à tout prix, de ne pas perdre pied, etc.). Donc on peut dire à la personne : “à votre avis, allez-vous entrer légèrement en hypnose ou profondément ?”, “allez-vous entrer en hypnose en deux minutes ou en dix minutes ?”, “votre corps va-t-il être lourd ou léger ?”, etc. Le thérapeute décrit des étapes et en répondant à chacune de ces suggestions, la personne a déjà accepté l’idée. Pour certaines personnes, cette technique marche, pour d’autres elle est trop légère. Selon moi, cette technique implique de beaucoup parler, cela peut durer très longtemps…
> Enfin, il y a l’hypnose que je pratique et que je préfère, c’est l’hypnose directe profonde ou hypnose elmanienne. Ce que l’on sait aujourd’hui c’est que 60% des gens sont sensibles à l’hypnose directe avec ses quatre composantes.
L'hypnose elmanienne est une technique d’hypnose directe un peu spéciale. Elle a été créée dans les années 1960 aux Etats-Unis par Dave Elman, hypnotiseur de spectacle et de renom célèbre dans les années 1960. Il a formé de nombreux médecins et anesthésistes à sa technique d’hypnose, particulièrement rapide et efficace pour les anesthésies, les douleurs, etc. L’induction d’hypnose d’Elman propose d’obtenir en quatre minutes une transe hypnotique profonde pour un réaliser un travail thérapeutique intense.
Dave Elman dit vouloir consacrer son temps à la séance d’hypnose pour régler le problème en question plutôt qu’à l’induction. A la différence de l’hypnose directe classique, Elman va codifier l’induction et y ajouter plusieurs techniques avec une philosophie de base : contourner la résistance du sujet et faire en sorte qu’il participe parce que, selon Dave Elman, l’hypnose n’existe pas vraiment, c’est de l’auto-hypnose guidée. Il faut donc guider la personne à entrer elle-même en hypnose.
La particularité de Dave Elman est qu’il va amener les gens au niveau des ondes cérébrales thêta, c’est-à-dire en ondes très basses, équivalentes à celles de la phase de sommeil avec des rêves. Sauf que l’on ne dort pas, le corps est au repos et on entend la voix du thérapeute au loin. Elman parle de “niveaux somnambuliques” et il explique que c’est à ce niveau-là que les personnes peuvent vraiment se reprogrammer.
En résumé, il y a donc quatre courants d’hypnose:
- l’hypnose classique directe,
- l’hypnose elmanienne directe,
- l’hypnose ericksonienne indirecte,
- la nouvelle hypnose indirecte.
Puis il y a l’hypnose spirituelle mais qui s'appuie sur des techniques d’induction profonde et qui relève donc essentiellement de l’hypnose elmanienne.
MedicalExpo e-magazine : Pourriez-vous expliquer les différentes ondes cérébrales existantes ?
On distingue quatre principales catégories d’ondes cérébrales :
- les ondes bêta de 14 à 25 hertz (Hz) ;
- les ondes alpha de 8 à 13 Hz ;
- les ondes thêta de 4 à 7 Hz ;
- les ondes delta de 0,5 à 3 Hz.
Nous sommes toute la journée en état bêta, celui des activités courantes. Toutes les une heure et demi, on part en alpha. Cet état on va le vivre naturellement une dizaine de fois par jour, c’est spontané et physiologique, cela nous repose, cela nous permet de faire le vide, d’enregistrer les informations, etc. C’est d’ailleurs pour ça que ceux qui sont toujours à fond et ne “redescendent jamais” font un burn out. L’état alpha c’est l’état de relaxation et de méditation.
Ensuite, les ondes thêta correspondent à l’état de sommeil avec des rêves. En hypnose, la personne en état thêta ne dort pas car sa conscience est là, elle entend la voix du thérapeute mais elle a l’impression qu’elle est à dix mètres d’elle.
Enfin, les ondes delta correspondent au sommeil profond sans rêves. On utilise ces états-là pour aller très loin, en hypnose spirituelle notamment. On vise cet état-là pour que l’hypnose soit vraiment réussie, sinon les gens verront des choses mais ils n’auront pas l’impression de les vivre réellement. Il y aura de la distance.
En fait, plus vous descendez profondément, plus vous allez vivre les choses. Vous ne serez plus observateur de ce que vous voyez, vous serez dedans. Vous pouvez ainsi retrouver la façon dont les événements ont été enregistrés par le subconscient, vous ne les interprétez pas.
MedicalExpo e-magazine : Vous expliquez que ces états correspondent également à la libération de neurotransmetteurs?
En effet, en termes de neurotransmetteurs, quand vous êtes en ondes bêta, vous êtes dans la libération de dopamine, vous êtes motivé, actif, etc.
Quand vous entrez en ondes alpha, vous êtes dans l'acétylcholine, c’est le relâchement, la relaxation, le premier état modifié de conscience. L’acétylcholine a deux rôles au niveau du cerveau : un rôle de créativité, de visualisation, de mémoire ainsi qu’un rôle hormonal (c’est le frein de l’adrénaline, il permet de relâcher le corps). Les gens tendus auront du mal à entrer en hypnose et il faudra user de techniques corporelles ou respiratoires pour entrer en hypnose. Erickson et le courant de la nouvelle hypnose travaillent dans les ondes alpha.Quand on entre en onde thêta, c’est l'acide γ-aminobutyrique ou GABA (gamma-aminobutyric acid), c’est un neurotransmetteur que l’on retrouve dans les anxiolytiques, cela permet d'enlever anxiété et angoisses. Quelqu’un qui manque de GABA sera anxieux et angoissé. Vous comprenez pourquoi certaines personnes n’entrent pas facilement en hypnose...
Puis en ondes delta, on libère de la sérotonine, c'est ce qui permet d’équilibrer les deux hémisphères du cerveau et d’éviter d’être dépressif. La sérotonine est un antidépresseur qui régule l’humeur. Lorsque vous prenez du LSD, vous libérez de la sérotonine, donc les hallucinations sous LCD traduisent un excès de sérotonine. Lorsque Dave Elman propose d’aller dans des niveaux somnambuliques ou hallucinatoires, c’est dans ces ondes-là qu’il travaille, là où la personne libère de la sérotonine.
Il faut préciser que les drogues agissent au niveau des neurotransmetteurs. Avec l'hypnose, on peut aller “naturellement” chercher ces états libérateurs sans prendre quoi que ce soit. C’est le gros intérêt.
- - - - - - - PARTIE II - - - - - - - -
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MedicalExpo e-magazine : Que peut-on traiter avec l’hypnose ? Des mal-êtres, des états dépressifs, des désordres psychiques, émotionnels ou physiques?
On peut traiter différentes sortes de problèmes à un niveau léger comme à un niveau beaucoup plus profond. Cela dépend de la technique que l’on va utiliser. Selon moi, il faut savoir tout pratiquer, aussi bien l’hypnose ericksonienne indirecte que l’hypnose elmanienne directe, car ne pratiquer que l’une ou l’autre reviendrait à jouer au tennis qu’avec le seul revers ou le seul coup droit. Il faut savoir maîtriser tous les coups.
Par exemple, vous allez voir un hypnothérapeute pour arrêter de fumer. Avec l’hypnose ericksonienne, on va vous dire que ce n’est pas bien de fumer et que votre subconscient peut choisir autre chose. Cela peut fonctionner. Avec une hypnose plus directe, on peut vous faire une inversion, c’est-à-dire que vous allez ressortir avec une aversion au tabac, vous trouverez cela dégoûtant et vous ne pourrez plus supporter l’odeur du tabac. Avec l'approche elmanienne, on va chercher à savoir pourquoi vous fumez : on met la personne en hypnose profonde et on demande à son subconscient de retrouver le moment qui est à l’origine de son envie de fumer. On demande alors au subconscient de décrire ce qu’il voit, entend, sent, ressent, la croyance qui se fait à ce moment-là et surtout qu’est-ce qu’il aurait fallu qu’il y ait à la place pour que la personne ne se mette pas à fumer. On cherche ainsi à savoir ce qui a été enregistré, puis on modifie cette représentation et on travaille pour remettre les compteurs à zéro. En gros, on efface le disque dur et on remet un nouveau scénario car le scénario précédent (celui qui a poussé la personne à fumer) est une sorte d’empreinte dans le cerveau qui, au niveau neuronal, va pousser la personne à toujours avoir les mêmes pensées, émotions, comportements.
C’est la triple interaction : les résultats qu’une personne a dans sa vie ne sont que l’interaction de ses pensées, de ses émotions, de ses comportements. C’était la volonté d’Elman d’aller très profondément en hypnose afin de faire une “régression”, c’est-à-dire de remonter à la cause du problème, à l’événement initial qui a perturbé le bon fonctionnement matriciel et a créé le symptôme. On pratique ainsi une reprogrammation mentale.
Donc pour revenir à votre question, en hypnose, on peut faire des arrêts tabac, enlever des phobies (avion, araignée, ascenseur, etc.), modifier des comportements pondéraux mais en fait on peut tout reprogrammer.
MedicalExpo e-magazine : Peut-on désancrer un trauma aussi avec la technique elmanienne de régression ?
On peut le faire avec la PNL et la technique qui s’appelle la RHP : remodélisation de l’histoire de vie. Avec cette technique, on va retrouver sur la ligne du temps le premier événement que l’on a eu et qui est à l’origine de tous les déséquilibres émotionnels que l’on expérimente. La PNL c’est de l’hypnose déguisée en fait, mais à un niveau moins profond.
Personnellement, mon objectif est de mettre les personnes en état thêta car l’état alpha que l'on retrouve en sophrologie ou en hypnose ericksonienne demeure suffisant si on veut arrêter de fumer ou si on veut mincir, mais quand on entre en état thêta on se déconnecte totalement du corps et c’est dans ces états somnambuliques-là que l’on peut vraiment travailler et transformer les gens à un niveau profond.
En état thêta, on est dans l’état dit “Esdaile” qui est une catatonie du corps. C’est encore plus fort que la catalepsie. Cet état de détente provoqué induit un relâchement total du corps et permet de libérer l'esprit. On peut par exemple utiliser cette technique pour faire des anesthésies sans aucun anesthésique.
James Esdaile (1918-1987) était un chirurgien écossais qui travaillait dans des hôpitaux en Inde et qui a appris grâce aux fakirs que l’on pouvait mettre les personnes dans un niveau de transe par le biais de passes magnétiques. Comme il n’y avait pas à l’époque d’anesthésiants disponibles, il mettait ses patients dans un état profond de transe et les opérait ou les amputait sans douleur, sans hémorragie (et sans alcool) dans cet état. En Grande-Bretagne, cette méthode a été contestée et son droit de pratiquer a été révoqué. La découverte peu après du chloroforme à Londres va complètement empêcher le développement plus important de l’Etat Esdaile. Sans l’arrivée de ces substances chimiques, on aurait pu continuer à pratiquer l’hypnose…
MedicalExpo e-magazine : Et pour les maladies mentales en psychiatrie, est-ce que l'hypnose peut marcher ?
Le problème c’est que dès que l’on touche au domaine psychiatrique c’est comme si l’on touchait à un tabou. En France, il y avait deux grands courants d’hypnose à la fin du XIXe siècle. Celui du neurologue Jean-Martin Charcot, spécialiste de la neurologie qui a travaillé à l'hôpital de la Salpêtrière à Paris et a mené de nombreuses études dans le but de comprendre les paralysies hystériques par l'hypnose. Selon lui, l’hypnose était réservée aux personnes hystériques car il y avait de bons résultats.
L’autre courant était celui du professeur de médecine Hippolyte Bernheim de l’Ecole de Nancy (il a notamment formé Freud) qui considérait que l’hypnose était accessible à tout le monde car il était un état naturel, physiologique et spontané.
Mais attention, il ne faut pas pratiquer l’hypnose sur les personnes schizophrènes ou fortement dépressives car elles sont déjà dans un état dissocié donc quand on endort ce genre de personnes, on ne sait pas quelle partie sera là quand on la réveillera. Il peut y avoir aussi chez ces personnes des phénomènes de décompensation, la personne ne parvient alors plus à se contrôler et entre dans une crise qui peut être particulièrement violente.
- - - - - - - - PARTIE III - - - - - - - -
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MedicalExpo e-magazine : A présent, je souhaiterais revenir à votre approche de reprogrammation mentale. Cela veut-il dire que pour obtenir les résultats que l’on souhaite dans sa vie, on peut le faire en reprogrammant notre subconscient ?
Si vous voulez avoir votre résultat, il faut modifier vos pensées, vos émotions et vos comportements. Pythagore avait une école à Croton que l’on appelait “les Vers d’Or”. Il disait que l’on ne pouvait pas s’endormir le soir sans récapituler sa journée, et si quelque chose ne nous avait pas plu il nous fallait modifier ces choses et visualiser ce que l’on aurait dû ou pu faire à la place. Et s’endormir sur ça afin d’amener cette vision à la place. On revoit ainsi la journée entière avec le nouveau programme et on s’endort sur ça. C’est de l’auto-hypnose et avec cette technique on peut reprogrammer exactement ce que l’on veut. Car notre cerveau enregistre le souvenir, et du souvenir va émaner des émotions, puis des comportements. Tout le monde peut le faire, c’est une discipline.
MedicalExpo e-magazine : Vous avez voulu, avec cette approche de reprogrammation mentale, vous pencher sur les sportifs de haut niveau…
Oui je suis devenu préparateur mental pour plus de 500 champions de haut niveau, pour des membres des équipes de France de rugby, de football et de ski. Sandrine Martinet, para-judokate française, est devenue championne olympique après nos séances ; Aleix Espargaró, pilote motocycliste espagnol, était 24e mondial et est passé 4e mondial après être venu me voir, etc.
Je fais des séances avec eux où je fais de l’hypno-programmation : je programme leur subconscient à se comporter différemment. C’est un peu comme quand on parle d’intelligence artificielle ou d’implants que l’on mettra un jour dans le cerveau afin d’apporter des capacités que n’ont pas encore les humains aujourd’hui. En fait, on peut déjà le faire en hypnose.
Il suffit pour cela de préparer de nouveaux programmes que l’on va mettre à des niveaux assez profonds pour que la personne croie qu’elle a toujours été comme ça. Cela permet d’enlever tous les problèmes de mésestime de soi, d'incapacités et d’arriver à ce que la personne se transforme. Il suffit de quatre à cinq séances de deux heures chacune.
A ce titre, je voudrais parler de quelqu’un dont on parle trop peu. Il s’agit du pharmacien Emile Coué qui va sortir en 1922 un livre intitulé “Maîtrise de soi-même par l'autosuggestion consciente”. Peu de temps après, il va faire une tournée triomphale aux Etats-Unis, ce qui fera de lui le troisième Français le plus connu aux USA.
Coué a révolutionné l'hypnose car il a dit que l’on avait deux choses en nous : soit la volonté, soit l’imagination. Avec le langage actuel, on pourrait dire que la volonté c’est la voie du mental ou le cerveau gauche, et l’imagination c’est la voie du coeur ou le cerveau droit. Coué dit que lorsqu’il y a opposition entre les deux, c’est toujours l’imagination qui l’emporte.
C’est-à-dire que si je veux vraiment une chose et que je suis déterminé à l’avoir mais que dans mon coeur je pense que je n’y arriverai pas, je n’y arriverai pas. Coué dit aussi que le but est de mettre l’imagination au service du mental et que si les deux travaillent ensemble on peut aller très loin. Quelqu’un qui n’a pas de volonté mais une imagination débordante pourra réussir. C’est quand même fort : un pharmacien, donc à la base très scientifique, va dire qu’en fait l’imagination est aussi une forme de réalité. C’est notre deuxième réalité, notre réalité subjective. Malheureusement, 100 ans après, les gens n’ont encore rien compris à ce message.
MedicalExpo e-magazine : Si l’imagination est notre deuxième réalité, notre réalité subjective, est-elle moins réelle que notre première réalité, c’est-à-dire notre réalité objective ?
Non, elle est juste invisible par rapport à la réalité objective que l’on peut voir, constater, toucher. Mais cette réalité subjective n’est pas moins réelle ! Je dirais même que c’est le subjectif qui amène l’objectif car nos résultats viennent de la programmation que l’on a dans notre subconscient.
Emile Coué en parle, la National Guild of Hypnotists (NGH, premier syndicat des hypnothérapeutes et le seul reconnu par l’OMS, dont Olivier Madelrieux fait partie, ndlr) en parle. Mais c’est quelque chose dont les écoles d’hypnose éricksonienne en France ne parlent pas…
Ces écoles oublient de dire qu’il y a 101 ans un pharmacien s’est posé la question suivante : pourquoi en prenant des médicaments (c’est-à-dire des molécules dont notre corps a besoin pour se guérir ou combler ses manques), certaines personnes guérissent et d’autres non ? Coué s’est aperçu qu’il y avait un paramètre qui bloquait et c'était l’imagination. Il a compris que les gens qui, en prenant un médicament, ne s’imaginaient pas redevenir en pleine santé et ne se voyaient pas guérir, restaient avec leur maladie. Il a mené pour cela des expériences en faisant prendre à des couples de personnes avec la même problématique, soit un vrai médicament, soit un placebo. Puis il a dit aux personnes prenant le placebo de répéter 42 fois par jour, matin, midi et soir, “tous les jours, à tous les niveaux je vais de mieux en mieux”. Coué s’est aperçu que le placebo fonctionnait aussi bien que le médicament. Il a alors tenté la même expérience sans prendre de placebo mais simplement avec l’autosuggestion (répéter 42 fois par jour, matin, midi et soir, “tous les jours, à tous les niveaux je vais de mieux en mieux”) et il s’est aperçu que les gens guérissaient beaucoup plus vite. Coué a compris que ce qui comptait c’est la suggestion et l’état d’esprit dans lequel on fait les choses.
MedicalExpo e-magazine : Pourquoi 42 fois ?
Il avait décidé qu’il fallait que le mental compte suffisamment longtemps car en comptant il ne pouvait ainsi pas faire de résistance, il était occupé en quelque sorte. C’est de l’hypnose en fait. Pendant que le mental est occupé à compter, le subconscient, lui, enregistre et prend la suggestion pour la “réalité”.
Je vous donne un exemple : si vous avez un projet, comme ouvrir une entreprise dans les deux prochaines années. En séance, la première chose que je demande est : “est-ce que lorsque vous fermez les yeux vous voyez la société, les clients, l’argent qui rentre?” Si la personne parle sans visualiser, elle parle à vide. Si elle parle en ayant en tête que son projet risque de ne pas marcher, il ne va pas marcher. Donc la base, et c’est malheureusement ce que les gens ne comprennent pas, c’est que lorsqu’ils parlent de leur projet, il faut qu’ils soient véritablement impliqués dedans pour que cela marche, il faut qu’ils visualisent chaque détail car l'imagination c’est le pouvoir du subconscient, donc il faut en parler comme si c’était déjà là et que ça marchait !
Et ce que rajoute Neville Goddard (1905-1972), qui a été le mentor de Wayne Dyer sur les pouvoirs de l’intention, c’est que “l’important c’est le ressenti”. Donc il faut de la visualisation, oui, mais tout en ressentant en même temps de belles choses. Le subconscient retient le ressenti. Si vous visualisez mais que vous ne ressentez rien ou que vous avez une émotion négative en même temps, cela n’ira pas.
Les émotions qui vont stimuler la dopamine ce sont la joie et l'enthousiasme (des émotions plutôt yin, féminines) ainsi que la détermination et la persévérance (émotions plutôt yang, masculines), en particulier la certitude que cela va marcher sans laisser la moindre place au doute. Et pour ne pas avoir de doute, il existe une émotion extraordinaire et extrêmement efficace : la gratitude.
MedicalExpo e-magazine : Donc le subconscient ne fait pas de différence entre la réalité objective et l’imagination ?
Non ! Et c’est ça qui est génial. Si vous fermez les yeux et que vous visualisez quelque chose, le cerveau ne sait pas si c'est vrai ou si c’est imaginé. C’est le point faible du cerveau donc il faut en faire une force.
Plus vous allez rêver et ressentir, plus vous allez faire croire à votre cerveau que c’est réel. Quelquefois, je dis en stage: “Hackez votre cerveau ! Prenez le pouvoir de votre cerveau ! Imaginez d’autres histoires que celles que votre cerveau vous raconte si celles-ci ne vous conviennent pas”.
MedicalExpo e-magazine : Les histoires que l’on se raconte ne sont en fait pas plus fausses que celles que l’on avait déjà inscrites dans notre cerveau ?
Non absolument pas ! Nous avons chacun en nous un discours intérieur, mais qu’est-ce que nous nous racontons au juste ? “Je ne suis pas capable de ci”, “je ne pourrai jamais faire ça”, etc. Est-ce forcément vrai ? Non pas forcément. Quel est votre but ? Est-ce que votre discours intérieur correspond à votre but ? Car ce que vous désirez voir et entendre dans votre monde extérieur, vous devez d’abord le voir et l’entendre dans votre monde intérieur. Il faut donc contrôler notre dialogue intérieur pour qu’il corresponde à nos désirs. Le discours juste et adéquat est celui que vous aurez une fois votre désir réalisé.
En ressentant et en imaginant la sensation du désir accompli, l’homme pourra ainsi modifier le futur en harmonie avec son imagination. L’homme devient créateur de son univers lorsqu’il met en adéquation ce qu’il désire et ce qu’il se dit à l’intérieur de lui-même. Au lieu de se demander : “Qu’est-ce qu’il faut faire? Est-ce que je vais y arriver?”, je dois me demander : “Qui suis-je? Quelle est ma conception de moi-même? Je suis ce que je désire”. Donc nous devons être et non pas faire. En fait, il n’y a rien à faire, tout arrive si on pratique cette méthode.
MedicalExpo e-magazine : C’est en gros tout l’inverse de ce que nous dit de faire la société ?
Exactement. C’est pour ça que j’ai créé une académie de la performance et de la réussite afin que les gens apprennent à avoir une autre idée d’eux-mêmes et qu’ils apprennent à se positionner. Tout ça c’est de l’auto-hypnose.
MedicalExpo e-magazine : Dernière question… Certaines personnes sont convaincues qu’elles ne peuvent pas partir en hypnose. Que pouvez-vous leur répondre ?
Je dis toujours : il n’y a pas de personnes qui n’entrent pas en hypnose, il n’y a que des forteresses mal assiégées. Erickson s’intéressait aux cas des personnes qui ne partaient pas en hypnose. Sur ces personnes, l’hypnose directe, trop directive, ne marchait pas. C’est pour ça qu’Erickson s’était mis à faire des techniques indirectes qui pouvaient durer quatre, six voire huit heures.
A la NGH, on apprend qu’il y a 5% des gens en moyenne qui sont réfractaires. Mais si ces personnes se donnent les moyens de faire au moins dix séances et d’y venir régulièrement, elles pourront réussir à partir en hypnose. Il y a ensuite les personnes résistantes, qui ne sont pas réfractaires mais qui ont du mal à partir, et qui représentent environ 10% de la population.
Sur les 85% restants, il y a six niveaux : les personnes qui partent légèrement, d’autres lentement, d’autres rapidement, d’autres profondément, d’autres qui vont carrément ailleurs, d’autres enfin qui se retrouvent dans des niveaux hallucinatoires ou somnambuliques.
Ce qui est intéressant c’est qu’au fur et à mesure que l’on pratique l’hypnose on va pouvoir aller de plus en plus loin. C’est comme un muscle que l’on développe, en allant voir un thérapeute dans un premier temps puis après en reproduisant seul chez soi ce que l’on a appris : la visualisation accompagnée du ressenti, les ancrages (en associant un état émotionnel à un geste spécifique), etc.
Plus vous résistez, plus vous avez peur. Les personnes qui résistent et ne veulent pas entrer en hypnose ont peur. Si elles ont peur, c’est qu’il y a des choses à aller régler. Moi je vais utiliser la peur de ces personnes et elles vont partir encore plus vite...
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